Quand un chauffeur de camion gagne plus qu’un avocat

Les prix du transport routier ont atteint un niveau historique. C’est le résultat de la nouvelle étude European Road Freight Benchmark. Les raisons en sont nombreuses et aucune amélioration ne se profile.

 

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Transport routier : des coûts records

Les perturbations de la chaîne logistique mondiale, le manque de capacité et la pénurie de chauffeurs sont autant de problèmes qui touchent le secteur du transport en Europe. Au troisième trimestre, l’index de l’étude European Road Freight Rate Benchmark a atteint un record de 107,6 et comptabilise 3 points de plus qu’à la même période l’an dernier. Ces chiffres ont été publiés par Transport Intelligence (TI), Upply et International Road Transport Union (IRU).

L’index des prix du transport routier a augmenté pour la cinquième fois consécutive.  Cela correspond à une hausse de 4 % par rapport au deuxième trimestre 2020.  Les experts pensent que les coûts de transport continueront d’augmenter au 4e trimestre en raison de la hausse de la demande et des capacités limitées.

Une pénurie de 400 000 chauffeurs en Europe

« Le manque de capacité va crescendo et devient monnaie courante sur le marché du transport routier en Europe », déclarent les analystes de cette étude. La Grande-Bretagne souffre notamment d’une pénurie de chauffeurs de camions qualifiés et d’embouteillages importants dans le port de Felixstowe, d’où des rayons vides dans les supermarchés. Le manque de chauffeurs ne se limite pas à la Grande-Bretagne. Alors que 70 000 chauffeurs manquent à l’appel là-bas, la France enregistre une pénurie de 40 000 à 50 000 chauffeurs, un chiffre qui atteint 65 000 en Allemagne. Au total, d’après les estimations du cabinet d’étude de marché britannique TI, il manquerait environ 400 000 chauffeurs dans toute l’Europe, dont 124 000 en Pologne.

  • La pandémie de COVID-19 a renforcé cette pénurie de chauffeurs, mais la situation était déjà préoccupante auparavant.
  • L’âge moyen des chauffeurs s’élève à 55 ans.
  • Les conditions de travail sont difficiles : les chauffeurs de camions doivent souvent passer neuf ou dix heures derrière le volant. Ils dorment régulièrement dans leur cabine et doivent prendre leur douche dans des stations-service.
  • En raison des contraintes sanitaires, de moins en moins de nouveaux chauffeurs ont pu être formés et passer leur examen.

En Grande-Bretagne, la situation est particulièrement précaire suite au départ des chauffeurs d’Europe de l’Est après le Brexit. Cependant, dans les autres pays, la situation risque également d’empirer d’après les experts. L’Allemagne devrait connaître « un effondrement des approvisionnements semblable à celui vécu par l’Angleterre d’ici deux à trois ans », alerte l’association allemande de logistique routière.  

Experts : une série de mesures indispensable

Seule une série de mesures pourra remédier à ce problème, les associations et les parties prenantes sont unanimes. De meilleures conditions de travail, la suppression des obstacles administratifs, mais surtout une meilleure rémunération font partie des points abordés.

Le déséquilibre entre la demande et l’offre limitée par le manque de chauffeurs a déjà poussé les entreprises du secteur du transport à augmenter leurs tarifs. « Du point de vue des entreprises de transport, cette hausse est nécessaire pour couvrir l’augmentation de leurs coûts d’exploitation et de recrutement. Le maintien de ces prix n’est pas garanti. Sans oublier que la protection de leurs marges deviendra un défi de taille dans les mois à venir », explique Thomas Larrieu, PDG d’Upply. Le prix du gazole joue aussi un rôle prépondérant d’après les experts.

 

Dans la chaîne de supermarchés Waitrose, les chauffeurs de camions gagnent en moyenne plus que les avocats et les architectes, d’après un rapport du Daily Mail. Cette chaîne offre jusqu’à 53 780 livres par an à ses chauffeurs. Au siège social de John Lewis Partnership, la société mère de Waitrose, deux postes de direction sont rémunérés à 45 000 livres et un poste d’analyste financier est rémunéré à 46 700 livres.

Conclusion

Le coronavirus a mis au jour de grands défis. Les problèmes dans le secteur du transport routier sont toujours plus graves. La relève est limitée en raison des conditions de travail pénibles et des formations onéreuses. Les chauffeurs (originaires d’Europe de l’Est principalement), recrutés pour un salaire de misère, ont changé de voie professionnelle. Dans le même temps, les besoins en transport sont toujours plus importants. Ce secteur essentiel a besoin d’une série de mesures pour assurer un transport routier sans encombres. Les entreprises traverseront cependant mieux cette crise sur le long terme, si elles offrent un salaire plus élevé aux chauffeurs routiers et de meilleures conditions de travail.

 

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